Je vous parlais hier ici de mon escale à Granville. Si je me suis arrêtée dans cette ville, ce n’est pas tout à fait par hasard. J’avais en effet planifié une visite au musée Dior depuis déjà de longues semaines. Au programme : Dior et l’impressionnisme.
Une exposition qui rassemble mode et art… Mon cœur chavire.
Je vais tenter en quelques lignes de vous transmettre ce que j’y ai appris et ce qui m’a marquée. Les photos étant interdites dans le musée, toutes les photos de robes proviennent du catalogue de l’exposition. Certaines des œuvres impressionnistes figurant dans ce post étaient présentées dans le cadre de l’exposition ou dans le catalogue. Les autres ont été sélectionnées par mes soins car je les trouvais parlantes au regard des sublimes créations de la maison Dior.
Lorsque l’on évoque l’impressionnisme, les premières images qui viennent à l’esprit sont souvent les superbes jardins aux mille fleurs peints par Claude Monet. Des centaines de petites touches de couleurs évoquent le frémissement de la lumière et des éléments sur cette nature vibrante, en constante métamorphose.


La robe Miss Dior créée par Christian Dior en 1949 et une robe de la collection Haute Couture automne-hiver 2012 par Raf Simons s’inspirent de ce traitement en petites touches typique de l’impressionnisme.
Mais alors que la première rappelle les petites « taches » de Monet ou Pissaro, la seconde fait plutôt référence au pointillisme de Seurat (voir Un Dimanche après-midi à l’île de la Grande Jatte). D’un côté, des pétales de fleurs ; de l’autre, des milliers de petites pastilles de mousseline évoquant autant de pierres précieuses.
« Après la femme, les fleurs sont ce que Dieu a donné au monde de plus charmant ». Christian Dior, The Little Dictionary of Fashion, 1954.
Robe du soir Belgique, en tulle point d’esprit blanc, collection Haute Couture printemps-été 1957, ligne Libre. De gauche à droite et de haut en bas : Printemps, Pruniers en fleurs, Camille Pissarro, 1877, Paris, musée d’Orsay; La Cathédrale de Rouen (effet du matin) détail, Claude Monet, 1894, Paris, musée d’Orsay; Soir de neige, Guillaume Vogels, 1883, Bruxelles, Musées Royaux des Beaux-Arts. De gauche à droite et de haut en bas : Robe du soir bustier en millefeuille de tulle et soie brodé multicolore, collection Haute Couture printemps-été 2013, Christian Dior par Raf Simons; Robe du soir Nuit de Grenade, en taffetas de soie imprimé, collection Haute Couture printemps-été 1960, ligne Silhouette de demain, Christian Dior par Yves Saint Laurent; Champs de coquelicots près de Giverny, Claude Monet, 1885, Boston, Museum of Fine Arts; Coquelicots, Claude Monet, 1873, Paris, musée d’Orsay.Si les fleurs et la nature en général occupent une place prépondérante dans la peinture impressionniste, la femme y est également un thème essentiel.
Chez Christian Dior aussi les deux sujets s’imbriquent. Dès 1947, la femme se fait fleur en revêtant les jupes et les robes corolles typiques du New Look. Après les années de guerre marquées par des coupes droites, le vêtement prend de l’ampleur. Le métrage de tissu nécessaire à la réalisation d’une robe New Look est important. Inenvisageable en temps de privation… et toujours perçu comme scandaleux quelques années après la fin de la guerre.
Ces volumes larges dans le bas du corps, cintrés au niveau du buste et mettant la poitrine en valeur, rappellent les silhouettes féminines dûment corsetées du XIXe siècle. Christian Dior va plus loin en réinterprétant les faux-culs typiques de cette époque, revisités 50 ans plus tard par John Galliano dans de superbes robes aux accents Tim Burtoniens.
On retrouve ces volumes exubérants dans Un dimanche après-midi à l’île de la Grande Jatte de Seurat, dans Femmes au jardin de Monet et dans les nombreux portraits de femmes peints par les impressionnistes.
De gauche à droite : Robe à danser Helvétie, en organdi blanc brodé de croissants de lune en dentelle bleue et paillettes, collection Haute Couture printemps-été 1956, ligne Flèche; Femme en robe bleue sous un parasol, Eugène Boudin, vers 1865, Le Havre, musée d’Art moderne André Malraux.Les œuvres impressionnistes constituent en fait une source précieuse pour l’étude de l’habillement du dernier tiers du XIXe siècle. Robes, chapeaux, ombrelles et corsets y sont en effet représentés avec détail.
On ne peut cependant pas parler de naturalisme, car ce qui compte n’est pas de représenter les choses telles qu’elles sont, mais telles qu’on a envie de les raconter. L’impression importe plus que la réalité.
La lumière et le mouvement font vibrer les robes et les cheveux comme ils font frémir les pétales de fleurs et les feuilles des arbres. On retrouve cette importance du mouvement dans les créations Dior. Le vêtement est conçu pour bouger avec celle qui le porte, pour l’accompagner dans ses activités quotidiennes. Comme dans la peinture impressionniste, la femme Dior n’est pas une image figée. Et qui mieux qu’une danseuse incarne cette femme en mouvement ?
Des créations telles que la robe Cygne noir ou la robe du soir en tulle et satin de soie, issue de la collection prêt-à-porter automne-hiver 2004 par John Galliano, s’inspirent directement du ballet. Ces robes, par leur légèreté, rappellent les tutus des danseuses de Degas aux couleurs poudrées. Les coupes fluides évoquent aussi les robes légères balayées par le vent des Femmes à l’ombrelle de Monet.
Les influences de l’impressionnisme sur les créations Dior sont donc variées. Au cours des décennies, les créateurs successifs se sont inspirés de ce courant artistique à différents niveaux, réussissant toujours à imposer leur patte tout en respectant l’ADN de la maison. On reconnaît au premier coup d’œil la signature d’Yves Saint Laurent, celle de John Galliano ou encore celle de Raf Simons. Et pourtant, l’esprit Dior est bien présent dans toutes ces créations.
Mon coup de cœur va à la robe Madeleine issue de la collection Haute Couture automne-hiver 2005 par John Galliano. Du génie à l’état pur ! Une version très moderne des Femmes à l’Ombrelle de Monet.
Robe Madeleine, collection Haute Couture automne-hiver 2005, Christian Dior par John Galliano, photographie de Patrick Demarchelier.Coup de foudre aussi pour cette tenue d’amazone, toujours par Galliano.
Madame Darras, Auguste Renoir, vers 1868, Paris, musée d’Orsay; Veste en laine noire et jupe en laine blanc cassé, collection Haute Couture printemps-été 2010, Christian Dior par John Galliano, photographie de Patrick Demarchelier; Les amazones au Bois de Boulogne, photographie du début du XXe siècle.L’exposition présente bien d’autres robes magnifiques. Je ne peux malheureusement pas tout vous montrer ici.
Une bonne raison de vous y rendre si vous passez dans le coin !
Le jardin de la Villa « Les Rhumbs », maison d’enfance de Christian Dior, vaut également le détour et complète magnifiquement l’exposition par ses parterres de fleurs et le parcours « Impressions de Parfumeur », consistant en l’interprétation olfactive des oeuvres impressionnistes.
Florilège :
A voir absolument !
Impressions Dior : Dior et l’Impressionnisme
4 mai – 22 septembre 2013
Musée Christian Dior – Granville
Je trouve votre article magnifique et d’une grande finesse ! Merci beaucoup
Merci pour votre commentaire qui me va droit au coeur !